Ban Ki-moon : “nous vivons une époque d’injustice et d’intolérance”

Avec Euronews



Le monde a plus que jamais besoin de paix. Une évidence qu’il est nécessaire de rappeler pour Ban Ki-moon. Le secrétaire général des Nations Unies a accordé une interview à euronews, en marge du premier Forum mondial de la démocratie qui s’est tenu au Conseil de l’Europe à Strasbourg. Il évoque la Syrie, le Nord du Mali et la guerre verbale entre Téhéran, Tel-Aviv et Washington et multiplie les rappels à l’ordre.

Giovanni Magi, euronews :
“Le Printemps arabe a fait naître l’espoir à travers le monde, mais la transition vers la démocratie semble très difficile et a déclenché dans certains cas, de nouvelles tensions géopolitiques. Dans quelle mesure les Nations Unies peuvent-elles contribuer à cette transition ?”

Ban Ki-moon, secrétaire général de l’ONU :
“Je suis certain que le vent du changement continuera de souffler. On a assisté à des développements très positifs en Tunisie, Egypte, Libye, au Yemen et ailleurs tandis que la situation est toujours délicate en raison des violences persistantes en Syrie. Par conséquent, nous devons aider ces pays en transition. C’est l’une de mes principales priorités en tant que secrétaire général des Nations Unies.
Nous devons établir un cessez-le-feu immédiat en Syrie. Déjà, 19 mois ont passé et plus de 20.000 personnes ont été tuées.
Aux côtés de l‘émissaire international sur la Syrie, Lakhdar Brahimi, je continuerai de consulter les pays-clé pour résoudre cette situation le plus tôt possible. C’est notre responsabilité politique et morale d’aider ces populations.”

euronews :
“Lors de la dernière Assemblée générale, vous avez dit que vous étiez contre les menaces d’action militaire adressées d’un Etat à un autre. Faisiez-vous référence à la guerre des mots qui oppose en ce moment, l’Iran, Israël et les Etats-Unis ?”

Ban Ki-moon :
“J’ai mis en garde les membres des Nations Unies sur le fait qu‘échanger cette rhétorique politique très forte, discuter de la guerre de manière retentissante, c’est très inquiétant et contre-productif. Et donc, je les ai exhortés à s’abstenir d’utiliser une telle rhétorique. Ce qui veut dire que tous les problèmes en suspens devraient être réglés pacifiquement, par le dialogue, et ce message a été transmis auprès des parties concernées, à la fois l’Iran et Israël. L’Iran doit respecter dans son intégralité, la résolution prise sur le sujet par le Conseil de sécurité et coopérer totalement avec l’Agence internationale de l‘énergie atomique. La communauté internationale est très préoccupée par les intentions des autorités iraniennes dans le dossier nucléaire.”

euronews :
“Autre urgence au plan international : le Nord du Mali. Le Conseil de sécurité discute d’une possible intervention militaire. Pensez-vous que ce soit une solution adaptée à la situation ?”

Ban Ki-moon :
“Nous avons appelé au retour de l’ordre constitutionnel. Le Nord du Mali est passé aux mains de ces islamistes radicaux. Ce qui est très inquiétant. Ils appliquent la loi islamique : la Charia. C’est une situation totalement inacceptable.
Le président du Mali par intérim, Dioncounda Traoré a demandé aux Nations Unies de déployer des forces militaires. Je sais que le Conseil de sécurité a discuté de ce sujet, mais avant de mobiliser des troupes, nous devons être très prudents.
J’en appelle à ce que toutes ces crises soient résolues pacifiquement, notamment au Mali.
Les pays du Sahel souffrent de multiples difficultés : instabilité politique et sécuritaire et problèmes humanitaires. L’ONU mobilise toutes ses agences pour fournir de l’aide humanitaire d’urgence et je m’apprête à désigner un envoyé spécial pour le Sahel. Cet envoyé spécial dont j’ai proposé la nomination au Conseil de sécurité jouera le rôle de coordinateur entre les partenaires-clé dans la région.”

euronews :
“Lors de la dernière Assemblée générale, vous avez dit que nous vivions “une époque de détresse, marquée par un chômage en hausse, l’inégalité et l’intolérance et que “les Nations Unies devaient être à la hauteur de ces difficultés.” Comment ?”

Ban Ki-moon :
“J’ai tiré la sonnette d’alarme auprès des dirigeants internationaux : nous vivons une période d’instabilité, d’inégalité, d’injustice, d’intolérance. Nous devons nous occuper de ces questions.
C’est la responsabilité collective des chefs d’Etat, en particulier en ces temps où la situation économique mondiale reste très difficile.
J’ai condamné cette vidéo qui ridiculise et critique les leaders de certaines religions. La liberté de parole et d’expression s’applique à tous, mais cela ne veut pas dire que certains peuvent provoquer la haine et la colère en abusant de la liberté de parole.
Dans le même temps, la violence ne peut être justifiée selon les circonstances. Donc, tout devrait être réglé par la compréhension et le respect mutuel des valeurs et des croyances de l’autre. C’est un point sur lequel les Nations Unies vont davantage mettre l’accent grâce à l’Alliance des civilisations.”



euronews :
“Pensez-vous que la structure actuelle des Nations Unies soit efficace pour s’occuper de tensions internationales majeures ou est-il nécessaire de réformer cette organisation ?”

Ban Ki-moon :
“L’ONU a toujours essayé de s’adapter à ce monde qui change en menant des réformes – des réformes institutionnelles – et en faisant évoluer son style de management. Pour autant, ce n’est pas l’institution qui pose problème. C’est la volonté politique ou plutôt l’absence de volonté politique. S’il y a une volonté politique forte et que les dirigeants font preuve de volonté concrète et décisive, on peut surmonter la faiblesse des institutions.

La réforme du Conseil de sécurité a été discutée par les Etats-membres pendant si longtemps, le Conseil économique et social (Ecosoc) a été réformé et même ma fonction l’a été : c’est une priorité de changer le management des Nations Unies pour qu’elles puissent satisfaire les attentes de la communauté internationale de manière plus efficace, plus réelle, plus transparente et plus responsable. C’est un engagement fort que je prends.”



L’initiative des Nations-Unies, l’Alliance des civilisations :

Alliance des Civilisations


Octobre 2012

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