La «guerre de l’information» fait rage autour de la Crimée
Par Anastasia Becchio de RFI




La Russie a encore resserré son étreinte sur la Crimée, région autonome d'Ukraine que ses forces contrôlent de facto depuis ce week-end. La menace d'une intervention de plus grande envergure reste réelle. La guerre des nerfs se poursuit et avec elle, la guerre de l'information.

« Du délire total » : voilà comment les autorités militaires russes ont commenté l’information qui a jeté le trouble dans les médias et la blogosphère hier, lundi 3 mars. L’agence de presse Interfax Ukraine, citant une source au sein du ministère ukrainien de la Défense, a fait état d’un ultimatum, enjoignant les militaires ukrainiens de Crimée à se rendre avant l’aube sous peine d’être attaqués.

Le message sommait les soldats ukrainiens de reconnaître les nouvelles autorités pro-russes en Crimée, de déposer les armes et s'en aller, sous peine de subir un assaut.

"Le meilleur Ami de l'Homme après la Mitrailleuse lourde"

Cet épisode n’est que le dernier d’une longue série qui n’est pas près de s’arrêter. La propagande et la désinformation font partie de la stratégie côté russe comme ukrainien. Mais à Moscou, les médias n’hésitent pas à employer « l’artillerie lourde » : mercenaires formés à l’étranger, qui ont fait la révolution et amené des « fascistes » au pouvoir à Kiev, ressortissants russes en danger, désertions en masse dans les rangs des militaires ukrainiens. Autant d’informations non confirmées voire erronées.

Des journalistes ukrainiens ont d’ailleurs commencé à recenser ces informations douteuses que les télévisions russes passent en boucle, comme ces images de files de véhicules patientant à un poste frontière, censées illustrer la fuite de dizaines de milliers de réfugiés ukrainiens vers la Russie. Le poste en question se trouve en fait à la frontière entre l’Ukraine et la Pologne.

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Ukraine : Moscou va rencontrer les représentants de l'OTAN
Avec Le Monde et l'AFP

Plus d'une semaine après la chute du gouvernement Ianoukovitch, la situation connaît un semblant d'apaisement après les déclarations de Vladimir Poutine excluant un recours à la force « pour le moment ». Le point sur les événements.

    ▪    Une rencontre OTAN-Russie mercredi
La Russie et les représentants de l'OTAN devraient se retrouver mercredi pour une réunion autour de la crise ukrainienne selon l'agence Associated Press (AP). Cette rencontre extraordinaire a été proposée par le secrétaire général de l'Alliance atlantique, Anders Fogh Rasmussen, et acceptée mardi par Moscou.

    ▪    Le Conseil de l'Europe dénonce la répression en Ukraine, l'Union européenne promet des sanctions
Auteur d'un rapport rendu public mardi 4 mars, Nils Muiznieks, commissaire aux droits de l'homme pour le Conseil de l'Europe, a dénoncé « l'usage excessif de la force par une police depuis démantelée », les « berkouts » et préconisé une profonde réforme des forces de l'ordre.

De son côté, la diplomatie française a annoncé que l'Union européenne allait mettre en place des sanctions à l'encontre des personnalités coupables de violations des droits de l'homme et de détournements de fonds publics en Ukraine.

    ▪    Les marchés financiers rassurés
Après un vent de panique lundi, les marchés relâchaient la pression mardi à la mi-journée après les propos mesurés du président russe, Vladimir Poutine. Rassurées dès l'ouverture par l'ordre aux troupes russes de rentrer dans leurs bases en Ukraine, les grandes places financières européennes ont fait un bond en avant après les déclarations de Poutine en fin de matinée.

Vers 14 h 30, la Bourse de Paris s'affichait ainsi en nette hausse de 2,09 %. Celle de Francfort gagnait 2,02 % et Londres prenait 1,44 %. L'Eurostoxx, qui regroupe les principales valeurs européennes, progressait de 2,15 %.

Après son plongeon de la veille (une chute de 10 %) dû aux inquiétudes sur la crise en Ukraine et ses répercussions sur l'économie russe, la Bourse de Moscou a repris des couleurs en terminant mardi sur une hausse de 5 %.

    ▪    John Kerry arrivé à Kiev
Le secrétaire d'Etat américain est arrivé en Ukraine pour une visite de quelques heures en signe de soutien au nouveau régime. Selon des responsables voyageant avec lui, les Etats-Unis vont proposer une assistance économique à Kiev, offrant d'accorder notamment 1 milliard de dollars (727 millions d'euros) dans le cadre d'un prêt international.

    ▪    Poutine exclut « pour le moment » une intervention militaire
Pour Vladimir Poutine, « un coup d'Etat anticonstitutionnel a eu lieu en Ukraine » sous la forme d'« une prise de pouvoir par les armes ». L'ancien président Viktor Ianoukovitch, destitué le 22 février, « est le seul président légitime en Ukraine », a ajouté le chef de l'Etat russe lors d'une conférence de presse, tout en précisant que Ianoukovitch n'avait « plus d'avenir politique ». Toute décision d'employer les forces armées russes en Ukraine sera « légitime », a par ailleurs estimé le président russe, même si l'usage de la force militaire n'est « pas nécessaire pour le moment » : « Si nous prenons cette décision, nous la prendrons uniquement pour défendre le peuple ukrainien. »

Vladimir Poutine a, en outre, démenti que des forces russes encerclassent les bases militaires ukrainiennes en Crimée. Les forces armées ayant pris le contrôle de cette péninsule du sud ukrainien étaient des « forces locales d'autodéfense » selon lui

    ▪    Tirs de sommation de militaires (russes) en Crimée
Des tirs de sommation sont intervenus à proximité de la base aérienne ukrainienne de Belbek, près de Sébastopol en Crimée, alors qu'un groupe de 300 militaires ukrainiens était en train de s'approcher de l'aéroport mardi matin. « Ils ont tiré plusieurs coups en l'air et ont dit qu'ils ouvriraient le feu s'ils continuaient de s'approcher », a affirmé un officier ukrainien à l'AFP. Les soldats ukrainiens se sont arrêtés et sont restés à l'extérieur de la base, selon la même source. Les forces russes encerclent la base de Belbek, à l'intérieur de laquelle se trouvent des dizaines de soldats ukrainiens.

    ▪    Gazprom annonce la fin du tarif préférentiel du gaz vendu à l'Ukraine
Le géant gazier russe Gazprom annonce qu'il mettra fin, à partir du mois d'avril, à la baisse du prix du gaz vendu à l'Ukraine, accordée en décembre dans le cadre d'un plan de sauvetage de cette ex-république soviétique, « étant donné que l'Ukraine ne remplit pas ses obligations, ne remplit pas les accords sur l'octroi d'un rabais signés comme avenant au contrat ». Le patron Alexeï Miller suggère par ailleurs d'accorder entre 2 milliards et 3 milliards de dollars à Kiev pour régler sa dette gazière.

    ▪    « Pas de solution en vue », selon le chef de la diplomatie allemande
« J'ai eu un entretien difficile, long et très sérieux, mais il n'a pas été suffisant pour dire qu'une solution est en vue », a affirmé mardi le chef de la diplomatie allemande, Frank-Walter Steinmeier, après sa rencontre lundi soir avec son homologue russe, Sergueï Lavrov.
« Je ne peux pas lancer un signal pour dire que nous sommes en bonne voie de trouver une solution et que l'Ukraine et la Russie vont se parler », a-t-il ajouté. Il a toutefois salué l'annonce du renvoi dans leurs casernes des troupes russes.

    ▪    Un conseiller du Kremlin menace Washington d'apocalypse financière
La Russie réduira « à zéro » sa dépendance économique vis-à-vis des Etats-Unis si Washington impose des sanctions à son égard en raison de la situation en Ukraine ; ce qui aboutira au « krach » du système financier américain, a averti mardi Sergueï Glaziev, un conseiller du Kremlin.
Une source au Kremlin a toutefois peu après indiqué à l'agence de presse publique RIA Novosti que M. Glaziev avait exprimé son opinion personnelle et qu'il ne s'agissait pas de la position officielle du Kremlin.

    ▪    Poutine interrompt les exercices militaires à l'ouest de la Russie
Vladimir Poutine a ordonné aux troupes russes qui effectuaient des exercices militaires inopinés depuis mercredi de rentrer dans leurs bases. L'opération devait durer jusqu'au 3 mars et mobiliser 150 000 soldats. Ces dernières manœuvres avaient débuté quelques jours avant que la Russie commençât à envoyer massivement des militaires en Crimée.

4 Mars 2014

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