L’hydrogène prêt à décoller
Par Loïc Chauveau

Filiale d’Areva, Areva H2Gen vient d’inaugurer la première usine française de fabrication d’électrolyseurs. Une étape essentielle pour développer l’usage de l’hydrogène dans les transports et pour dans le stockage de l’énergie mobilité.

FIABLE. C’est un bâtiment industriel de 2800 m2 qui n’a rien de spectaculaire. Pourtant, la prochaine révolution énergétique pourrait bien partir de cette usine des Ulis (Essonne). “Nous sommes aujourd’hui en mesure de produire industriellement des électrolyseurs d’une puissance comprise entre 100 kilowatts (kW)  et 1 mégawatts (MW). Un produit fiable : le client n’aura plus qu’à brancher pour s’en servir”, résume Cyril Dufau-Sansot, le président de l’entreprise.



Le cœur de l’innovation, c’est l’électrolyse à membrane à échange de protons (PEM, Proton Exchange Membrane). Cette technologie issue de 25 années de recherche utilise une membrane polymère capable de casser la molécule d’eau pour isoler les protons hydrogène. Elle a l’avantage de remplacer les bains alcalins qui ont le double défaut de corroder les pièces des électrolyseurs et d’avoir besoin de monter en température pour démarrer. Au contraire, la PEM s’adapte dans la seconde aux variations de puissance d’une source d'électricité. L’originalité apportée par Areva H2Gen, c’est la conception de cellules d’électrolyse qui s’empilent pour atteindre la puissance souhaitée. La construction en chaîne de ces modules baptisés “stacks” permet de réduire les coûts.

La voiture à hydrogène prend la route



SURPLUS. Ce nouveau produit vise trois marchés. L’un existe déjà, c’est celui de l’usage de l’industrie. L’hydrogène est en effet utilisé pour refroidir des alternateurs de plus de 150 MW dans les centrales électriques ou encore pour créer une atmosphère de protection contre l’oxydation notamment dans la métallurgie ou la fabrication de verres plats. Les deux autres usages vont exploser dans les années à venir, c’est du moins ce qu’espère l’entreprise. Avec la montée en puissance des énergies renouvelables, la question de l’intermittence de la production devrait être résolue en partie par l’hydrogène. En cas de forte production (journée ensoleillée, grand vent), l’électricité en surplus est dirigée vers des catalyseurs pour produire de l’hydrogène qui est soit stocké dans des réservoirs pour être restitué en fonction des besoins, soit injecté dans le réseau de gaz naturel.



Ce réseau peut en effet accepter une teneur de 20 % d’hydrogène. L’Allemagne fait déjà face à ce problème : en 2015, 1,5 milliard de kilowattheures (kWh) en provenance d’énergies renouvelables n’ont pas pu être injectés dans un réseau saturé. Cela représente la consommation annuelle d’une ville de 285 000 habitants comme Nantes. L’Ademe estime que le surplus annuel d’énergie renouvelable pourrait osciller entre 30 et 90 milliards de kWh en 2050. La “chasse au gaspi” est donc réouverte.



L’autre marché, c’est la “mobilité”, comprenez les transports. “Avec une unité de 1 MW, vous alimentez une station-service pour véhicules à hydrogène”, assure Cyril Dufau-Sansot. Annoncée depuis maintenant 20 ans, la pile à combustible semble enfin s’installer sous les capots des voitures. Hyundai et Toyota commencent à commercialiser des modèles. Il faut donc créer un réseau pour fournir ce type de carburant dont le plein —effectué dans le même laps de temps que l’essence — permet de parcourir 500 kilomètres. Aussi puissant que les moteurs thermiques actuels, les piles à combustible ont par ailleurs le bon goût de ne rejeter que de l’eau.



BREXIT. Areva H2Gen se retrouve face à un marché mondial. Aux États-Unis, l’entreprise va bientôt livrer deux électrolyseurs destinés à des stations-service de Los Angeles et San Francisco (Californie), où s’organise une véritable “autoroute de l’hydrogène”. Areva conçoit également un électrolyseur pour le site de l’entreprise de traitement des déchets Braley, dans l’Aveyron, où sera installée la plus grosse station hydrogène de France. Areva participe par ailleurs à de nombreux projets européens comme Hydrogen Mobility Europe dont la deuxième étape va créer 20 stations-service hydrogène et déployer 1230 voitures à pile à combustible. Ce programme pourrait d’ailleurs être touché par le «Brexit ». Le coordinateur du programme est en effet la société Element Energy qui a ouvert une station hydrogène à Londres le 13 mai dernier. La sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne devrait couper tout accès de cette société britannique aux appels d’offres européens.



6 Juillet
2016

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