Les entreprises françaises invitées à un « nouveau partenariat » avec l’Afrique

Par Claire Guélaud






Ancien directeur général d'Accor Afrique, Philippe Colleu a créé et dirige Onomo, une chaîne d'hôtels 3 étoiles à destination d'une clientèle d'hommes d'affaires et de classe moyenne. Son pari ? Proposer des services aux normes internationales mais avec une architecture et une décoration locales, ce qu'il a fait à Dakar, Abidjan et Libreville. Il prévoit d'inaugurer 25 hôtels dans les cinq prochaines années dans les capitales d'Afrique occidentale et centrale, en ouvrant le capital de ses établissements à des investisseurs locaux.


Onomo est un bon exemple de ce que pourrait être ce nouveau partenariat économique entre l'Afrique et la France qui réunit, mercredi 4 décembre à Bercy, au ministère de l'économie et des finances, plus de 600 personnes (chefs d'Etat et de gouvernement, ministres, chefs d'entreprises, représentants d'institutions internationales…).


 
Le Français Florimond Labulle, 31 ans, et le Burkinabe Thierry Kientega, 29 ans, ingénieurs de formation, se sont rencontrés à l'école des Ponts où ils faisaient leur thèse. Avec chacun 1 000 euros en poche, ils ont créé AfroMania Group, un site de commerce en ligne qui propose plus d'un million de références dans quinze rubriques, allant des ordinateurs aux vêtements, et qui livre partout en moins de sept jours. Soutenus par Medef International, les deux entrepreneurs ont fait une première levée de fonds en septembre 2012. Goldman Sachs, une banque de Dubaï et le cabinet de conseil McKinsey à Londres leur ont donné un coup de pouce. Mais pas d'investisseur français. Et, alors qu'ils sont en train de réaliser leur deuxième levée de fonds, toujours pas le moindre capital-risqueur français à l'horizon !



LES PROJETS ABONDENT

Jean-Michel Severino a repris en 2011 Investisseurs & Partenaires (I & P), qui se propose de soutenir des patrons africains de petites et moyennes entreprises et de start-up. En dix ans, I & P a investi dans 50 entreprises en Afrique de l'Ouest, du Centre et dans l'océan Indien. Ancien directeur général de l'Agence française de développement, M. Severino vient de lever plus de 54 millions d'euros pour pouvoir investir d'ici à 2016 dans une trentaine de nouvelles sociétés. « Plus d'un tiers de notre portefeuille est composé d'Africains de la diaspora qualifiés. Ils rentrent au pays avec un métier, une expérience professionnelle de dix à quinze ans, un pécule, et se lancent dans la création ou la reprise d'entreprise ».



Les projets abondent dans une Afrique subsaharienne qui, après plus d'une décennie perdue, connaît, depuis dix ans, une croissance moyenne de 5,5 % par an (contre 3,7 % pour l'économie mondiale). Avec 700 millions d'habitants en 2000 et 1,9 milliard en 2050, selon l'ONU, elle va devenir le plus grand réservoir de main-d'oeuvre et de consommateurs au monde.



Urbanisation accélérée (40 % de citadins), émergence d'une classe moyenne de 326 millions de personnes, selon la Banque africaine de développement, essor du secteur privé, environnement plus favorable à la croissance : autant d'éléments qui, selon les sénateurs Jeanny Lorgeoux (PS) et Jean-Marie Bockel (UDI), auteurs du rapport « L'Afrique est notre avenir », expliquent la ruée des pays émergents (Chine, Inde, Brésil, Turquie…) vers une Afrique en pleine confiance.



ÉNORMES OPPORTUNITÉS

« Les grands investisseurs internationaux asiatiques, latino-américain et américains investissent en Afrique. Les fonds de private equity [investissement en fonds propres] y arrivent. Et l'épargne africaine, en particulier celle de la diaspora, s'investit localement. C'est une nouveauté depuis dix ans », observe Philippe Gautier, directeur général adjoint de Medef International.

Au-delà des hydrocarbures et des mines, qui ont permis le décollage de nombreux pays, la téléphonie mobile, les banques, les services logistiques, tout ce qui est lié à l'aménagement et à la planification urbaine (eau potable, déchets etc.), les activités portuaires, aéroportuaires et ferroviaires offrent d'énormes opportunités de croissance. Alstom, qui vient de signer un contrat de 4,5 milliards d'euros avec les chemins de fer sud-africains, Bolloré avec le port en eaux profondes de Conakry, le bureau Véritas et la Soget qui améliorent les procédures douanières et les flux logistiques portuaires en savent quelque chose.



Pourtant, entre 2000 et 2011, les parts de marché de la France en Afrique se sont effondrées, passant de 10 % à 4,7 %, selon Hubert Védrine, ancien ministre socialiste des affaires étrangères, chargé par Pierre Moscovici d'un rapport sur les moyens de renouveler les relations entre l'Afrique et la France. Pour remobiliser la France au côté d'une Afrique en marche, la première des quinze propositions de sa commission porte sur la rénovation des procédures de visas économiques, que M. Sévérino juge « restrictives à un point hallucinant ».



4
Décembre 2013

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