Les nouvelles approches thérapeutiques contre le cancer se multiplient

Le congrès Eurocancer, qui s'est ouvert à Paris mardi 27 juin et se terminera le 29 juin, ne manquera pas de souligner les progrès accomplis vers des thérapeutiques plus efficaces et mieux ciblées.

Des agents dirigés contre l'angiogenèse, processus par lequel les tumeurs font proliférer les vaisseaux sanguins qui vont les nourrir, ou les ARN "interférents" font partie de ce nouvel arsenal thérapeutique."La chimiothérapie restera encore le pilier du traitement du cancer pour de nombreuses années et elle sera de plus en plus utilisée avec des agents antiangiogéniques, de même que les autres thérapeutiques ciblées", écrivait, le 26 mai, le docteur Robert Kerbel (université de Toronto), dans un cahier spécial de la revue Science consacré à la recherche sur le cancer.

Président d'Eurocancer et directeur du Centre de l'innovation thérapeutique en oncologie et hématologie à l'hôpital Saint-Louis (Paris), le professeur Michel Marty partage ce point de vue : "Les agents cytotoxiques utilisés en chimiothérapie possèdent une cible moléculaire. L'identification et l'utilisation de cette cible permettent d'augmenter la population susceptible d'en bénéficier."

Michel Marty cite ainsi l'exemple de cancers bronchiques dans lesquels seules les cellules tumorales présentent un déficit dans la réparation de l'ADN. Ces cellules cancéreuses vont être plus sensibles aux agents cytotoxiques lésant l'ADN et mourront.

La recherche de traitements anticancéreux spécifiques d'une cible moléculaire suppose cependant qu'une telle cible existe et que la tumeur ne puisse pas contourner l'action du médicament en empruntant d'autres voies pour favoriser la prolifération des cellules cancéreuses.

Plusieurs études ont montré que la combinaison de molécules cytotoxiques utilisées en chimiothérapie et d'autres traitements anticancéreux débouchait sur une activité thérapeutique nettement plus importante.

Fragments d'ARN




Autre voie de recherche, les molécules dirigées contre l'angiogenèse tumorale. Investie par de nombreuses équipes universitaires ainsi que par les grands laboratoires pharmaceutiques, elle présente un double intérêt selon le professeur Marty : "Elle touche à un mécanisme extrêmement généralisé, commun à toutes les tumeurs : la formation de nouveaux vaisseaux à partir de cellules souches endothéliales normales. De ce fait, l'activité thérapeutique de certains agents antiangiogenèse pourrait se manifester sur les cancers de différents organes."

Inspirée par la génétique des plantes, une autre approche fait l'objet de nombreuses études : l'interférence ARN (ARNi), qui désigne un mécanisme de stimulation des systèmes de défense de la cellule, grâce à de petits fragments d'acide ribonucléique (ARN).

Ceux-ci viennent se fixer à l'ARN messager, chargé de traduire l'ADN en protéines. En s'appariant, les deux molécules d'ARN constituent un double brin, assez similaire au matériel génétique de certains virus, ce qui déclenche sa reconnaissance et sa dégradation active par la cellule.

Déjà utilisé pour combattre certains virus s'attaquant aux végétaux, l'ARNi semble pouvoir fonctionner dans les tissus animaux, en mettant hors circuit, de façon ciblée, la production de protéines impliquées dans certaines maladies, cancers compris.

In vitro, l'ARNi fonctionne de façon satisfaisante. Les approches thérapeutiques sont encore suspendues à la possibilité de transporter l'ARN dans les cellules cancéreuses. L'injection via le réseau sanguin ou directement dans les tissus affectés est envisagée.

Une équipe américaine avait utilisé contre l'hépatite B la livraison d'ARNi par des virus, qui semblait également prometteuse. Mais elle vient d'annoncer, dans la revue Nature, la mort de la plupart des souris impliquées dans l'expérience.

Cet échec, laisse craindre que la machinerie cellulaire puisse "dérailler" de façon incontrôlée. Le phénomène devra être élucidé avant que l'ARNi puisse remplir ses promesses thérapeutiques.

Paul Benkimoun et Hervé Morin

Juin 2006

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