Mars
2014

L'actualité du Mois

Urgence Européenne
Par
Gilles Marchand




L'Europe est à la croisée des chemin. Soit elle réagit à temps, soit elle court le risque mortel de se laisser engluer dans une vague d'europessimisme rédhibitoire…


Des années de construction européenne désincarnée, ont détourné la belle idée des pères fondateurs de ses objectifs et lui ont à priori volé une part prépondérante de son âme. Nombreux sont les dossiers qui sont victimes d'une indécision chronique. Nombreuses sont les décisions salvatrices qui ne sont pas prises. Nombreux sont les retards qui ont été pris, à commencer par le temps invraisemblable qu'à pris le sauvetage de l'euro après 2008. Quatre années d'errances perdues qui ont enfin été rompues avec l'arrivée de nouvelles majorités, revivifiées par le bain démocratique dont elle avaient bénéficié, comme en particulier le gouvernement socialiste français. La banque centrale européenne devenant de facto prêteur en dernier ressort des états, la crise s'est éteinte instantanément. Il était temps que les plus hautes institutions financières européennes recouvent cet aspect de leur souveraineté et se comportent sur les marchés comme les différentes banques centrales mondiales. Quatre années qui ont eu de lourdes conséquences… La cour de Karlsruhe, jouant avec le feu, a tenté de remettre en cause cette acquis, mais a finalement reculé devant l'énormité du risque d'une telle décision, remettant à la cour européenne de justice, le soin de légiférer…



Aujourd'hui l'Europe apparait pour certains démagogues schématisant leurs analyses à outrance comme un problème alors que sa vocation est d'être avant tout la matrice d'élaboration des solutions dont le continent a besoin. L'Euro joue comme une arme contre-productive tant le discours ambiant qui ne traite pas dans l'esprit des gens, des réalités qu'ils vivent.  C'est en particulier le cas des français, qui ont assisté à la translation en valeur absolue contante, des prix originalement en francs vers l'euro. Une baguette à un franc est aujourd'hui vendue à un euro. C'est clair pour tous, sauf pour les hommes politiques qui continuent à vivre dans le déni. Ce n'est pas tant la conversion qui posait problème quoique les cours respectifs des monnaies nationales en euro étaient visiblement sous évaluées, sauf en ce qui concerne l'Allemagne, ni même que l'introduction de la monnaie unique n'est pas été accompagnée d'une mesure de blocage des prix contraignante, quoiqu'elle aurait pu contribuer à éviter les mauvaises surprises actuelles.

L'Euro n'est pas un problème en soit, c'est même une immense victoire de l'Union Européenne, mais il a beaucoup concouru à accentuer la cherté de la vie et beaucoup ont l'impression, les salaires étant restés à des niveaux sensiblement identiques, que leur pouvoir d'achat a diminué… Il est crucial que l'euro soit encadré par une véritable politique budgétaire, monétaire et financière transnationale. Il est par exemple actuellement de plus en plus clair que le différentiel de parité euro / dollar est actuellement beaucoup trop haut, la monnaie européenne étant surévaluées de 25% environ… Quelques centimes d'euro excédentaires, et ce sont des points de croissance en moins… Dévaluer la monnaie unique, c'est aérer le tissu industriel et favoriser la relance du commerce. On obtiendrait ainsi un retournement de la balance commerciale extérieure qui deviendrait excédentaire avec toutes les conséquences positives qui seraient induites.

Les politiques européennes souffrent également de la faiblesse du budget européen, qui préconditionne en particulier la possibilité d'une véritable Europe Sociale comme celle évoquée et défendue par Jacques Delors dans un récent ouvrage ainsi que les grands investissement publics européens. Décider la création d'une entité juridique de pleins droits qui soit dotée d'une budget souverain conséquent est une décision qui pourrait être prise en une nuit par le conseil européen réuni en session plénière. L'Europe en tant que telle a zéro centime de dette… Des politiques industrielles nouvelles doivent être mises en place à l'échelle de l'Europe comme elles le sont actuellement en France. Les domaines d'innovation sont innombrables. Les possibilités de créer des filières  et des champion européens du type d'Airbus sont réelles, en particulier dans le domaine de l'énergie, de l'internet et de la télévision du futur.



Mais le principal problème de l'Europe est d'ordre politique. Des années de crise accumulée ont fragilisé les bases de son système économique et social. Elles ont créé des tensions et des souffrances sociétales exagérées qui ont elles mêmes accentué les égoïsmes tant nationaux et qu'individuels, provoquant un repli identitaire et la montée des populismes, une vague généralisée d'euroscepticisme  qu'il est désormais essentiel de combattre avec les outils intellectuels appropriés.

Certains sujets sont effectivement abandonnés aux mouvances extrémistes et doivent être d'urgence traités par les principaux partis politiques qui doivent imaginer l'offre politique qui manque dans le paysage politique européen. Or la nature a horreur du vide. Il s'agit de répondre aux principales interrogations, il est indispensable de fournir des solutions à ces bassins de population minés par la crainte du déclassement et la perte de ce qui fait leur identité propre. Le malaise nourrit la peur de l'autre et la peur est mauvaise conseillère. Elle remet en cause les bases du vivre ensemble, et semble défaire un à un les fondamentaux du contrat social. Il faut redonner à chacun les possibilités concrètes de maitriser sa vie en augmentant par un biais ou un autre son pouvoir d'achat donc sa liberté de choix existentielle. Créer les conditions d'une prospérité à venir, c'est préparer l'étape suivante, c'est donner à l'Europe de l'espace et du temps. C'est préparer la reconquête d'une opinion qui doit réaliser à quel point elle se met en danger par sa porosité irrationnelle vis à vis des thèses extrémistes. Se tourner vers les pires courants politiques européens ne tarde pas à déboucher sur des décisions contre productives, comme c'est le cas en Suisse.



Le vote helvète doit résonner comme une mise en garde tant les conséquences économiques néfastes de ce choix seront profondes. Les programmes politiques, en particulier économiques, de ces partis sont des tissus d'inepties. Il faut en être prévenus. Il vaut mieux se documenter sur ceux que l'on s'apprête à élire plutôt que de découvrir après coup que l'on a affaire à des fossoyeurs de l'idée européenne, donc de notre principale chance… Comme disait Mitterrand, le nationalisme c'est la guerre… Il n'est pas nécessaire de revivre une histoire qui s'est avérée violente et cruelle pour les peuples d'Europe entrainés dans le tourbillon mortifère des passions humaines, pour savoir qu'un tel destin, sans vigilance, sans précautions de notre part, est toujours possible… Mais une telle morale de l'histoire n'est pas une fatalité. Il suffit d'être plus conscients des besoins réels d'un continent qui est en danger et qu'il faut à toutes fins utiles éloigner durablement des récifs, pour le voir voguer à nouveau dans les eaux calmes de la sérempidité.



Cette faculté magique qui consiste à trouver sans chercher…


12 Février 2014

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